Petit dialogue matinal. « Merde il pleut. » « Bon nous allons déjeuner, et nous verrons après » « T’as vu il pleut des cordes, et la salle à manger commence à être inondée. »
Ce matin c’est plutôt mal parti. Nous chargeons quand même les sacoches et partons sous la pluie vers le village pour faire le reste des achats de croque pour 5 jours. Il pleut toujours lorsque nous nous enfilons dans un resto pour manger.
La chance nous colle aux fesses. 13 heures le soleil est là. En route camarade. Direction Salta. Nous devons revoir notre itinéraire, la route pour Cachi est coupée par les pluies. Nous passerons donc par la Quebrada del Toro, avec un détour par la Laguna du même nom.
La route est grasse, les pneus collent à la piste, nous devons nous faire violence pour avancer. Chaque kilomètre nous rapproche de la fin de ce voyage. Le moral n’est pas terrible, surtout que le vent se fait un malin plaisir de nous souffler dans le nez. Nous plantons la tente comme plusieurs fois dans ce voyage juste avant la pluie.
Un invité surprise nous fait sursauter. Un lama curieux et vachement téméraire vient voir si il y a quelque chose a se mettre sous la dent dans notre tente.
Mercredi 9mars.
Le beau temps est de retour. Nous pedzons un peu pour permettre au soleil de sécher la tente. Il nous reste quelques kilomètres de route goudronnée pour atteindre l’Abra Blanca, notre dernier passage à plus de 4000m. Superbe descente avec de nombreux arrêts photos. Des fleurs, des fleurs encore des fleurs. Faut dire que la région a bénéficié de nombreuses pluies, et la nature en profite un max, nous aussi. Tout droit c’est Salta. Alors comme nous ne voulons par encore rentré nous nous trouvons des détours pour prolonger le plaisir. Seul hic, ça grimpe et la route est bien défoncée par les pluies. Alors nous devons monter en poussant les vélos. De nombreuses parties sont ensablées. Cela me bouffe une énergie monstre, surtout que je fais des aller-retour pour aider Rosy à passer les endroits les plus merdiques. C’est complètement naze que je monte la tente à l’abri d’une ancienne gare en ruine. J’espère que demain la route sera meilleure. Bonne nuit les petits.
Jeudi 10 mars
Le beau est toujours avec nous. Et les gars ,la route est bonne et elle descend. Enfin pour un bout seulement. Car du sable est venu enrailler la mécanique. 33 km dont 15 de sable, à pousser les vélos. Nous commençons à regretter notre « petit » détour. Surtout que comme d’habitude nous sommes bientôt à court de nourriture. Il va falloir bouffer du cactus.
Heureusement le camp est superbe, au bord de la Laguna de Toro. On peut voir les flamants roses depuis la tente.
Vendredi 11 mars
Deux chiffres, 11 heures, 22 kilomètres.
Acte 1 : Hier nous avons planter la tente à l’ouest de la Laguna del Toro, à l’hombre de la montagne. Si nous voulons partir à 9 heures , il va falloir plier mouillé. Le soleil ne va pas sécher la rosée de la nuit. Pas grave.
Acte 2 : Le cavalier à qui nous demandons comment est la route qui descend vers la route 51, nous dit qu’il vaut mieux ne pas y aller car la pluie a fait de gros dégâts. Bon il doit être un peu marseillais. On y va quand même. Les 3 premiers kilomètres, on slalome entre les flaques d’eau, et on se dit que pour le moment on a du bol.
Acte 3 : La route décide de traverser de l’autre côté de la vallée. Drôle d’idée, car il n’y a plus de route. Une trace de moto, nous montre le chemin. Si une moto est montée par là, c’est que cela doit passer. En route camarade. Nous avons mis les chaussures pour la flotte, nous sommes parés. De l’eau mis mollets, nous rejoignons l’autre rive. La boue colle aux roues, et le vélo devient de plus en plus lourd, mais ça passe.
Acte 4
Les traces de la moto partent vers un gros rocher sur la droite. Derrière ce gros rocher, une ferme avec des chèvres. Comme le cavalier de ce matin, le fermier nous conseille de faire demi-tour. « Il y a beaucoup d’eau » qu’il nous dit. La perspective de se retaper toute la montée de la veille. De pousser dans le sable ne nous réjouit guère. Sur la carte du gps, je ne voit pas d’autre rivière en aval et l’eau de la rivière en me fait pas peur. Nous prenons la décision de continuer.
Actes 5 et suivants
Sur plus de 17 kilomètres, nous devons pousser, tirer, porter les vélos pour avancer. Nous avons droit à de nombreuses traversée de rio. Plus on descend plus le courant est fort. A un endroit, une avalanche de pierres a bouché la vallée. Il s’est formé un petit lac que l’on ne peux contourner par la gauche. La droite, avec sa végétation n’est pas plus engageante. Je décide de suivre la route. Sur 200 mètres, en faisant attention de ne pas glisser, ça passe. Tout d’un coup je me retrouve avec de l’eau jusqu’au bas ventre. Superbe sensation, la vase qui ne veut pas me redonner ma sandale et les sacoches avant complètement sous l’eau laissant sortir de grosses bulles d’air, donc qui se remplissent de flotte. Je ne savais pas que mon vélo avait une marche arrière. Vous non plus je pense. De retour à la terre ferme, nous vidons les sacoches pour tout faire sécher. Je tente le coup par la droite avec le vélo de Rosy. Là je retrouve des traces d’un cheval qui me redonnent l’énergie un peu folle de continuer. Plus d’une heure pour faire passer les 2 vélos.
De la route, plus de route, de la route, plus de route, de la route, plus de route, plus de route, plus de route, plus de …
A 18 heures, je laisse mon vélo vers une ferme où nous allons pouvoir monter la tente et je descend sur un kilomètre environ à la recherche de la route. Sans succès je remonte vers Rosy les oreilles en bas. Je n’ai pas retrouvé la route et ce que j’ai vu me déprime. Il va nous falloir une autre journée pour passer le petit bout que j’ai vu. Nous allons vers la ferme pour nous renseigner sur la suite. Une femme, son bébé sur le dos, fait la lessive au ruisseau. Je ne sais pas qui ne comprend pas qui, mais nous n’avons pas les idées plus claires après avoir discuté avec elle. Le fermier arrive. Espérons qu’avec lui nous aurons plus de chance. Nous négocions un peu d’aide avec son cheval et son âne.
Acte ???
Les sacoches sont chargées sur Buro Negro, c’est le nom de l’âne. Esteban et Ramiro son fils 12 ans, nous accompagnent sur plus de 2 kilomètres. La route est sur la rive gauche alors que je la cherchais rive droite. C’est à la tombée de la nuit qu’ils nous laissent. « D’ici la route est bonne » qu’il nous disent. Esteban me laisse décider du prix de la prestation. L’honnêteté de ces gens me surprendra toujours. Nous montons la tente sous les étoiles éclairés de la lune et de nos lampes frontales. Ce soir pas de cuisine, si ce n’est qu’un bon café au lait en poudre et quelques galettes de dulce de leche.
Bien que complètement nazes, nous n’arrivons pas à dormir, nous nous remémorons les passages du jour.
Nous voulons de l’aventure, et bien aujourd’hui nous avons été servi. Demain courbatures garanties.
Samedi 12 mars
Ce matin nous attendons le soleil, because il faut finir de faire sécher ce qui ne l’est pas, les passeports et les dollars en particulier. Il parait que la route est bonne. Moins mauvaise, oui, mais bonne non. Le paysage lui est superbe. Les petites fleurs redonnent de l’énergie à Rosy. Surtout qu’en fin de journée, nous avons droit à un vent contraire à vous tirer les crottes du nez. Bin oui pas toujours « à décorner des bœufs ». Vers 17 heures nous retrouvons la route goudronnée. Et comme le vent devient notre allier et que 4 kilomètres nous séparent du prochain pueblo Alfarcito, nous les avalons à la vitesse grand V. Nous trouvons le seul comedor et en y arrivant nous réalisons que nous y sommes déjà passé en 2005. Griselda nous sert un poulet-frites qui nous fait le plus grand bien.
« El pollo de Griselda, a Alfarcito, es el mejor pollo del mundo ! »
Ce soir le vent dans les grands arbres bercera notre sommeil. Bonne nuit les grands. Bin oui pas toujours « les petits ».
Dimanche 13 mars
Petit déjeuner offert, nous sommes invités. Merci beaucoup. Nous prenons congé de Griselda et de son compagnon et en route pour Campo Quijano 70km pour 1500m de descente. La route est goudronnée sur 60 km. Du gâteau après ces 3 derniers jours.
Le petit frère du vent d’hier nous siffle dans les oreilles. Aujourd’hui il est le bienvenue, « Comme ça nous allons moins vite et nous admirons le paysage plus longtemps. » me dit Rosy. Il faut dire que c’est notre avant-dernier jours à vélo. La nostalgie de mardi passé s’est noyée dans les nombreuses traversée de rios. Nous nous réjouissons de retrouver une bonne douche, des habits propres et un bon steak argentin.
Cette journée est magnifique. Nous passons de la zone désertique à la zone tropicale. Comme il a beaucoup plu, tout est vert. Des cactus verts entourés d’herbe, ce n’est pas banal. Des fleurs, encore des fleurs nous arrêtent souvent. Elles sont plus faciles à photographier que les oiseaux, elles.
Un dernier passage à guet un peu chaotique, la montagne ayant compris la théorie de la pomme de Newton pour emporter la route et nous voici arrivés. Notre dernière nuit sous tente, dans un camping avec douche FROIDE, sur du gazon.
Demain ce sera Salta, la fin de ce périple à vélo.
Lundi 14 mars
Aujourd’hui 33,3Km, ce n’est pas un gag. Nous prenons tout notre temps. Le film se termine tranquillement. Nous chantons, nous sifflons sur la route. Quelques photos de fleurs ou d’oiseaux. Nous prenons conscience de la chance que nous avons. Aucun accident, aucun problème. Que de belles rencontres, que de beaux paysages. Des moments de tête à tête pleins d’émotions.
Nous arrivons à Salta pour retrouver Analia, notre amie.
Nous nous offrons un bon hôtel et allons passer les prochains jours à préparer nos montures pour le retour. Un petit détour (en bus) par les chutes d’Iguazu est prévu avant le départ pour la Suisse, le 28 mars.
Besos a todos.
Rosy et Phil